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Numéro 2, 2022 : L'Afrique et le monde à l'heure virale.

Une brève histoire de la biopolitique au Sénégal. L'ordre hygiéniste de la société

Une brève histoire de la biopolitique au Sénégal. L'ordre hygiéniste de la société

Adama Aly Pam

Rubrique - Global Africa N°2

(Re)découverte

Citation

Aly Pam, A. (2022). Une brève histoire de la biopolitique au Sénégal. L'ordre hygiéniste de la société. Global Africa.

Aly Pam, Adama. Une Brève Histoire de la Biopolitique au Sénégal. L'ordre Hygiéniste de la Société. Global Africa, 2022.

Pages  - 

62 - 70

Date de sortie  - 

16 décembre 2022

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En Français

L’histoire de la médecine coloniale en Afrique est aussi celle de l’instauration d’un ordre politique et idéologique théorisé par les médecins coloniaux. Cette étude est une contribution à l’histoire de la traque des miasmes et des virus dans les lointaines contrées d’Afrique, considérée comme « le tombeau de l’homme blanc » et interroge les pratiques de la bio-politique et de la gouvernementalité associées à la mise en ordre des sociétés colonisées à travers les politiques de santé publique qui ont durablement laissé leur empreinte sur l’espace et les corps. La faiblesse de l’historiographie francophone autour des questions de l’histoire de la santé dans les possessions françaises d’Afrique a été pendant longtemps freinée par la justification de l’action médicale comme un bienfait justifiant l’entreprise coloniale et la mission civilisatrice de la France. S’interrogeant sur les interactions qui ont prévalu entre santé et colonisation, les auteurs anglophones font intervenir la nouvelle médecine en tant qu’acteur primordial de l’entreprise coloniale et estiment qu’on ne peut analyser l’une sans l’autre.

Certains auteurs ayant abordé la question de la fièvre jaune expliquent son introduction en Afrique par le biais du commerce triangulaire des esclaves entre l’Afrique, l’Europe et l’Amérique. Face à la réputation d’insalubrité des colonies, la pacification biologique – plus que la pacification politique – était le préalable de toute œuvre de conquête. C’est au début du XX e siècle qu’une nouvelle politique tournée vers la protection de la population « indigène 1 » est mise au point.

La politique sanitaire se tourne alors vers la question démographique. Devant la difficulté de soumettre les indigènes à l’hygiénisme, d’une part, à cause des quarantaines, des vaccinations obligatoires et des cordons sanitaires et, d’autre part, parce que les indigènes étaient considérés comme des réservoirs de virus où toutes les maladies contagieuses prenaient leur source, l’administration s’est progressivement résolue à une politique de mise à l’écart de la population dans des quartiers interdits aux Européens et assimilés. La recherche médicale s’est servie du corps des indigènes comme cobaye et ces pratiques du passé amplement documentées par les archives médicales ne cessent de revenir dans les discours des groupes opposés aux politiques de vaccination actuelles.

Mots-clés :

Politique sanitaire, hygiène, discrimination, médecine occidentale, surveillance, bio-politique, gestion des épidémies, médecine tropicale, colonisation, institut Pasteur, pastoriens

In English

The history of colonial medicine in Africa is also the history of the establishment of a political and ideological order theorized by colonial doctors. This study is a contribution to the history of the search for miasmas and viruses in the far-flung regions of Africa, considered to be “the tomb of the white man”, and investigates bio-politics and governmentality practices related to the establishment of order in colonized societies through public health policies that have left their lasting mark on the space and the bodies. The weakness of francophone historiography regarding the history of health in the French possessions in Africa has long been hindered by the justification of medical action as a benefit that justifies the colonial enterprise and the civilizing mission of France. By questioning the interactions that had existed between health and colonization, English-speaking authors put forward the new medicine as a primary actor in the colonial enterprise and believe that it is impossible to analyze one without the other.Some authors who have studied the issue of yellow fever explain its introduction into Africa through the triangular slave trade between Africa, Europe and America. Since the colonies had a reputation for being unhealthy, biological pacification - more than political pacification - was the prerequisite for any attempt at conquest. It was at the beginning of the 20th century that a new policy oriented towards the protection of the “indigenous” population was developed. Health policy then turned to the demographic issue.Considering the difficulty of subjecting the indigenous people to hygiene, on the one hand, because of quarantines, compulsory vaccinations and sanitary cordons and, on the other hand, because the indigenous people were considered as reservoirs of viruses where all contagious diseases have originated, the administration progressively adopted a policy of segregating the population in areas forbidden to Europeans and assimilated people. Medical research has used the bodies of the indigenous people as guinea pigs and these past practices, extensively documented by medical archives, keep on reappearing in the speeches of groups opposed to the current vaccination policies.

Keywords :

Health policy, hygiene, discrimination, west-ern medicine, surveillance, bio-politics, epidemic manage-ment, tropical medicine, colonization, Pasteur Institute, Pastorians

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